12/07/2013 Général Barrera « C’était vraiment une guerre, et nos ordres étaient clairs »
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Général BARRERA: "C'était vraiment une guerre, et nos ordres étaient clairs !"
Tout juste rentré de l’opération Serval, le général Bernard Barrera, patron de la 3ème Brigade mécanisée de Clermont-Ferrand, nous a confié ses impressions sur ce conflit mené tambour battant…
« Aujourd’hui, il n’y a pratiquement plus d’attaques jihadistes. L’ennemi est en partie détruit, et ce qui reste évite le contact armé. Nous transmettons le flambeau aux Maliens, et au contingent africain composé de Guinéens, de Sénégalais, et de Nigériens ».
Les Auvergnats ont été très impliqués dans la libération du Mali : l’état-major de Clermont-Ferrand a commandé les opérations terrestres. Les combats de Gao ont été menés par le 92 RI et son chef de corps, le colonel Bert. Le colonel Rivet du 28 RT d’Issoire a assuré toutes les transmissions sur place.
La libération du Mali n’a pas été une promenade de santé : « Nous avons mené des actions aéroportées comme le largage du 2ème REP sur Tombouctou, des raids blindés sur des centaines de kilomètres, des combats en zone désertique et en zone urbaine. Pratiquement tous les cas de figure du combat terrestre et aéroterrestre.
« Les VBCI- Véhicules Blindés de Combat d’Infanterie du 92ème RI, les canons Caesar de mon régiment de la Valbonne à coté de Lyon, et les hélicoptères d’appui Tigre, ont obtenu de très bons résultats, et sauvé beaucoup de vies chez nos soldats.
« L’entraînement intensif avant le départ, a payé. Malheureusement, nous avons perdu 6 hommes : 2 des forces spéciale et 4 de la Brigade. C’est terrible pour les familles. Il n’y a pas eu de pertes dues à des tirs amis, ni d’accidents, et pas de victimes de notre fait dans la population. Et nous avons détruit environ 600 ennemis…
"Des combats de 5 à 8 heures dans les rues de GAO"
Les jihadistes sont-ils des combattants coriaces ? « Le 11 janvier, l’ennemi a pris un coup d’arrêt par nos forces spéciales et a dû renoncer à prendre Bamako. Ils se sont ensuite repliés de façon diluée dans la population, et nous n’avons pas pu les repérer sur 1.500 km. Mais nous avons retrouvé des rasoirs avec des barbes à coté.
« Les grands combats contre Aqmi- Al Qaïda au Maghreb Islamique, ont commencé le 19 février quand nous sommes entrés dans les vallées au nord. Là, enterrés et bien armés, ils nous attendaient. Nous avons eu notre premier mort le 19. Les Tchadiens ont attaqué le 22, et ont eu 26 morts et 70 blessés. J’ai fait monter l’artillerie, puis nous avons attaqué à nouveau le 26. Il nous a fallu deux semaines à Amatettaï pour casser l’ennemi, fouiller leur sanctuaire et récupérer l’armement. Il faisait 45° et pas question d’enlever le casques et les gilets pare-balles. Les hommes buvaient 10 litres d’eau par jour.
« Au même moment, les Gaulois du 92 étaient engagés dans les combats de Gao- « On s’est battu violemment, les combats duraient de 5 à 8 heures avec des dizaines d’ennemis qui attaquaient nos véhicules en criant « Allah akbar ». Parfois, cela s’est terminé au pistolet, donc à très courte distance. Le 92 a aussi été confronté à des terroristes équipés de ceintures explosives, et qui voulaient se faire sauter avec les militaires…
« Nous avons mis à jour des dépôts d’armes, des garages de véhicules, une fabrique d’engins explosifs pour déstabiliser tout le Sahel. Je peux vous dire que partout la population nous a renseigné, et toutes les autorités africaines ont remercié l’armée française, car après le Mali, la cible était le Niger et le Soudan ».
Retour à Clermont-Ferrand, le général Barrera a retrouvé son bureau, avec sur le mur le portrait du général de Monsabert, qui à la tête de la 3ème brigade mécanisée, a libéré la Provence et la vallée du Rhône en 1944. Son sentiment est celui du devoir accompli : « Les katibats ennemies ne terrorisent plus la population, et le pays va pouvoir retrouver un équilibre politique ». Il confie aussi : « C’était vraiment une guerre, et nos ordres étaient clairs ».
Les 5 à 600 Gaulois seront rentrés à la fin du mois. Le retour des derniers effectifs de la 3ème brigade sera achevé au 26 juin, date à laquelle une grande prise d’armes est prévue à Clermont-Ferrand.. La 3ème BM, créée en 1943, fêtera aussi ses 70 ans.
Jean-Jacques ARENE